vendredi 18 décembre 2009

Solstice d'hiver

Mes journées se confondent avec mes nuits. Avec le solstice d'hiver qui arrive, la durée d'ensoleillement qui est à son minimum, la nuit domine sur le jour. Et avec la fatigue et le stress et l'alcool et les jeux vidéos tout cela ne s'arrange guère. Mes journées passées les volets baissés me font penser à la vie parallèle dans le métro.
Dans le métro j'ai l'impression d'entrer dans un espace hors du temps. Qu'il soit 6h du matin, 15h ou 1h du matin il y a toujours des gens, il y a toujours des clodos, il y a toujours du bruit et de la lumière. L'espace se réduit à deux dimensions : des lignes qui zigzaguent sur un plan, l'heure n'existe plus, le temps se réduit à des intervalles de 7 minutes. Et quand on sort rien n'est pareil. Soit on a l'impression qu'il fait plus froid, soit la nuit est tombée entre temps, ou alors le jour s'est levé, ou simplement le paysage a changé, les gens dans la rue n'ont pas le même style.

Bref, tout cela se mélange. Dans mes rêves je suis amoureuse, dans la vie je suis concupiscen
te. Dans la vie je tue des gens dans mes jeux vidéos, dans mes nuits je hurle sur mes élèves. Je ne sais plus vraiment ce que je fais et ce à quoi je rêve.
L. passe fugitivement par Paris, il me manque mais pas au point de lui courir après. Il a raté un train, reste quelques heures, cherche un hôtel, me prévient à l'arrache mais à quoi bon.
Mon jeu vidéo est décidément
glauque. Des drogués en manque recroquevillés, un type sataniste... En fait ça m'est vaguement familier. Comme je descends des bouteilles en même temps que des méchants tout cela se trouble un peu dans ma cervelle ramollie. Un collègue est sadique avec les élèves mais en même temps il possède beaucoup d'humour. Il m'a scotché un mot doux sur mon casier "Je t'ai démonté Léa, elle ne devrait plus te faire chier. N'hésite pas à la pourrir cette connasse" J'aime les sadiques. En fait je comprends mon ex qui avait été démoralisé lorsqu'à la question "Pourquoi tu es avec moi ?" je lui avais répondu "Ben... t'es gentil" Et je me suis rendue compte que je n'aime pas les trop gentils. Je ne cherche pas forcément à ce qu'on me passe tout, qu'on me chouchoute. Je sais assez me chouchouter toute seule.

Mes journées étant très denses en événements et riches en émotions, le temps passe à 200 à l'heure. Puis comme dans un cauchemar, je perds mon téléphone portable, la fatigue et la nuit me jouent des tours. Je ne sais plus quel jour on est lorsque mon ordinateur attrape un virus. Entre deux verres je tente tout pour le supprimer mais mon antivirus s'affole, mon cœur aussi. En moins de deux j'ai définitivement planté mon ordi qui refuse alors de démarrer. La nuit, le cauchemar, non, c'est un rêve, je vais me réveiller. Mais non. Une journée passée face à un écran à tenter de bidouiller dans le BIOS pour réparer le bordel, puis formater, puis réinstaller, faire un scan. Les volets toujours baissés, le chauffage à fond, la neige trop blanche dehors. Les bandes-dessinées trop noires.

Un matin, 8h15 des hommes sonnent chez moi. C'est la livraison. J'avais oublié. Je dois descend
re leur ouvrir. Deux hommes à 8h30 me montent un clic-clac tandis que j'émerge à peine. Lorsque le jour se lève enfin ils repartent. Moi je reste en plein milieu, jouant au jeu des sept différences avec mon appart, comme si je n'avais pas remarqué la présence d'un énorme convertible en plein milieu.

J'ai plein de boulot mais aucun courage. Il faut que je fasse ma valise pour demain. Pour repartir en Alsace. J'ai l'impression que le nouvel an 2009 était hier. Je n'ai même pas tous mes cadeaux de Noël et n'ai encore aucune idée de où ni comment et dans quel état d'ébriété je vais encore passer la Saint Sylvestre cette année. Tout ce que je sais c'est qu'il fera encore nuit et que je rêverai de choses étranges.