lundi 29 août 2011

Des lignes


Ça y est, c'est passé, c'est digéré. A coups d'excès de margaritas, d'excès de films, d'images, d'excès de chlore, des longueurs puis des lignes mais des bonnes, celles que l'on trouve dans les livres. C'est sur la ligne 10 que j'ai lu les dernières de ce roman que j'ai failli lâcher au bout de quelques pages tellement c'était agaçant, cette façon de tout compter. Compter pour ne pas "intégralement rater sa vie". Une femme, solitaire, victime d'un toc (elle compte tout, mais vraiment TOUT) handicapant, qui rencontre un homme, suit une thérapie qui lui ramollit le cerveau, thérapie qu'elle va finalement arrêter pour redevenir elle-même. C'est le genre de bouquin qui marque car il crée une certaine résonance avec le présent : deux mois avant ou après il aurait peut-être été inintéressant.
J'ai aussi oublié à coups de décibels, de boue, d'odeur de poney : cette fameuse odeur particulière qui règne sur les festivals, indescriptible, une odeur de terre, de pieds, de sueur, et de paille, comme une odeur d'étables humaines. Retour à la solitude, deux jours sur les trois passés toute seule. Parmi des milliers de personnes. Toujours "seule avec des gens autour", plus que jamais. Quoique j'ai retrouvé mon bon vieux pote, mon deuxième cerveau, celui qui analyse avec cynisme ce que le premier cerveau voit (un peu comme dans mon bouquin). Premier cerveau : iiih Paul Banks ! Deuxième cerveau : sérieusement, Paul, c'est quoi ce blaser ?! Premier cerveau ; eh mais c'est MOI que Mike Skinner regarde, et en plus il me demande de lever la main comme lui, c'est incroyable il me regarde vraiment là, moi, la petite chose au premier rang ! Deuxième cerveau : hey je vais pas m'afficher à lever la main, regarde-le bêtement en souriant et fais semblant de ne rien comprendre à l'anglais ça va peut-être passer... Premier cerveau : wouahou, bravo grosse naze, foutre un vent à Mike Skinner c'est très très fort...
J'ai donc rechargé un peu mes batteries, après avoir laissé mon appart et mon corps en friche il est temps de redresser la barre et de me remettre à mes corvées. Prendre le métro avec tous ces "touristes" et rentrer chez moi après Rock en Seine m'a bizarrement fait prendre conscience que oui, maintenant ici c'est chez moi. La banlieue parisienne. Même si en rentrant à une heure du matin par le métro, fringues merdiques et couvertes de boue, cernes, Doc Martens rouges, blouson en cuir et T-shirt de Siouxsie and the banshees, je croise un élève, pas de problème, je tape la discute.
Premier cerveau : "Bon sang mais qu'est-ce qu'il fout dans le métro à cette heure quelque peu tardive ?!"
Deuxième cerveau :"-Ah, bonjour Ali, alors, quoi de neuf ?
-Bahhhh. Rien du tout madame... Vous êtes toujours au
collège P. ?
-Eh oui, je m'installe là-bas..."
Voilà, c'est lâché, je m'installe. Enfin.
Même s'il me manque encore un tapis mais je verrai ça plus tard.

mercredi 17 août 2011

Un tapis et un café

Essayer de l'oublier. Essayer de ne pas penser à lui. Difficile quand il m'a obsédée tout l'été. L’enthousiasme a pourtant vite cédé la place à la tristesse. Alors pour ne plus être triste, j'ai essayé de m'occuper la tête et les mains : déplacer les meubles de mon studio pour faire plus de place, pour y voir plus clair. Mais maintenant que j'ai planqué mon "tapis-moche" il m'en faut un autre. M'occuper la tête, partir à la recherche d'un nouveau tapis puis d'un meuble pour ranger de gros classeurs de cours. Oui car je me replonge dans mes cours. Oui car un soir, je rentre bourrée chez moi, j'allume mon ordi et je surfe sur le web. Et là, plutôt que de commander un sextoy (allez, c'est pas le genre de truc que tout le monde a déjà fait bourré sur Internet ? Ah bon...) je me suis inscrite à l'Agrégation de Physique-chimie option chimie alors que cela va faire 4 ans que j'ai plus suivi de cours, moi qui ai eu le Capes bonne dernière (mais du premier coup quand même). Depuis j'ai mauvaise conscience et je me suis mis en tête de réviser deux trois trucs quand même... Quand je l'ai annoncé à ma famille, j'ai eu un franc succès. "Il faut que je vous dise, j'étais bourrée, je me suis inscrite à l'Agreg..." Bref, fin de la parenthèse.
Ne plus y penser, ne plus rester en haleine, attendre désespérément un message le cœur battant la chamade pour finalement lire que mon forfait et mes options sont renouvelés jusqu'au 16 du mois prochain. S'il savait tout ça il me prendrait pour une folle. Écumer les magasins de déco, rentrer bredouille, encore plus frustrée qu'avant (c'est possible ça ?). Je referme la porte et m'effondre, j'ai presque envier de chialer pour un tapis. Mon appartement est trop vide maintenant. Bordel mais c'est quoi mon problème ? Il n'y a personne pour me dire ce qui cloche chez moi ? J'essaye de changer mon intérieur mais je ne sais pas ce que je veux. Comment trouver des objets originaux, esthétiques mais qui ne tranchent pas avec le reste ? Mission impossible.
Prendre ma douche sans y penser, sans me dire "C'est vraiment un connard de ne pas répondre à mes messages, ça coûte quoi bordel ? S'il ne veut plus entendre parler de moi il pourrait me le dire carrément ! Bon, de toute façon j'aurais jamais pu supporter un mec qui manque d'attention comme ça, et puis non, c'est même pas de l'attention, c'est juste de la politesse. Quand tu reçois un message le minimum c'est d'y répondre, je sais pas, même un ok, cool, on se tient au courant alors. N'importe quoi sauf le silence."
De la musique, une odeur de café : il faut que je trouve le bon dosage car je n'ai inauguré ma cafetière italienne qu'avant-hier. A force de boire mon café fait à l'ancienne je ne sais plus s'il est ultra fort ou juste très corsé. Au boulot, quand je clame gaiment "Je fais le caféééé !" tout le monde se regarde en coin avec un petit sourire gêné. Je n'ai jamais réussi à faire un café qui ait un arôme agréable mais qui ne fasse pas penser à la marée noire.
C'est le matin, café et internet, facebook, j'apprends que Matt Elliott passe au Point éphémère le 30 septembre, je me précipite pour acheter ma place. Enfin l'envie de pleurer me quitte. Je suis toujours en peignoir de bain fuchsia et les pieds nus sur le carrelage mais je m'en fous car mon n'amoureux, le seul, l'unique, celui qui a toujours su me consoler car sa musique me prouve qu'il existe sûrement plus dépressif que moi passe à Paris ! Merde au tapis dont j'ai rêvé et que je n'ai pas trouvé ! Je pivote sur ma chaise de bureau, fixe mon portable qui ne donne toujours pas signe de vie, et là je lui présente deux doigts d'honneur avec violence, avançant et reculant mes petits poignets pour montrer que je lui dis vraiment merde.
Matt Elliott a sauvé le début de ma journée. Le problème c'est que dans une journée il y a vingt-quatre heures. Après ce bref élan de courage, ce ressaisissement, la mélancolie à nouveau, un petit bout de dépression qui pointe le bout de son nez. Je tourne en rond chez moi, je n'ai pas le courage de sortir car j'ai peur de croiser mes élèves (ce qui arrive pratiquement à chaque fois).
Ma mère qui est malade on ne sait pas encore combien, entre le très grave et le grave. Je ne peux pas lui dire que je vais aussi mal, que je trouve ça injuste que je sois la seule à être seule à devoir le porter sur mes épaules. Mes sœurs ont chacune quelqu'un pour les consoler, les rassurer. Et bientôt la rentrée, il va absolument falloir que je me reforge ma carapace, pour ne surtout pas montrer ma souffrance, que j'aie l'air un minimum enthousiaste et combative. Il est aussi indispensable que j'arrête de pleurer pour une chanson, que j'arrête de prendre ma tête entre mes mains en disant "oh putain-putain-putain..." En attendant je suis nouée, j'ai envie de vomir, j'ai envie de prendre l'air mais je sais qu'il ne faut pas que je me penche du haut de mon balcon, pas dans cet état. Je crois que je suis un peu malade...