samedi 28 mars 2009

Education nationale mon amour

En ce moment je suis très préoccupée par ma mutation, et ce fameux mouvement intra-académique. J'esplique : à la rentrée je suis mutée dans la fameuse académie de Créteil, (le purgatoire des profs) qui comprend trois départements : Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Seine-et-Marne.
Là en gros il faut que je "choisisse" (c'est un mot optimiste) l'endroit où je "veux" être affectée l'an prochain. Tous ceux qui vont bouger dans Créteil font partie du "mouvement" et disposent d'un certain nombre de points en fonction de l'ancienneté, de la situation familiale, du type d'établissement dans lequel on travaille etc...
On doit faire 20 voeux. Evidemment, celui qui a le plus de points passe en priorité. A égalité de points c'est l'âge qui départage (le plus vieux gagne).
Comme je suis nouvelle, que je n'ai aucun points de Pacs, et que je suis une des plus jeunes de l'académie, je dispose du nombr
e minimum de points (21) sauf sur mon tout premier voeu (71). Pour faire simple, si mon premier voeu n'est pas accepté, je suis bais*** et je me retrouve remplaçante dans un endroit tout pourri où personne ne veut aller. C'est aussi facile que ça. C'est pourquoi mon premier voeu est décisif. Il ne faut pas que je sois trop ambitieuse sinon il ne sera pas accepté, mais il ne faut pas non plus que ce soit un voeu suicidaire sinon j'aurai gâché mes points pour que dalle.
En ce moment je change de stratégie toutes les heures. Une fois je me dis que je veux être remplaçante en Seine-et-Marne, une autre fois que je veux avoir un poste fixe en Val-de-Marne...

Je suis une girouette. Une fois je veux être loin de Paris (question de loyer), une fois je veux être plus près de Paris (question sorties), une fois je me dis que j'accepterais d'être en ZEP, une autre fois je me dis que je craquerais vite en ZEP.
Sachant que si je choisis un établissement classé merdique, j'accumulerai rapidement des points qui suffiront à me barrer d'ici trois ou quatre ans, mais si je suis dans un établissement qui craint moyennement, je devrais attendre dix ans avant d'espérer avoir mieux.

Je déteste l'idée de n'avoir aucune prise sur mon desti
n, l'impression qu'on mettra tous nos noms dans un sac et qu'on tirera au sort. Alors on me dit "être prof c'est la belle vie". En attendant, des gens vont décider de mon avenir à ma place, et daigneront m'en informer à peine quelques semaines avant la rentrée, me laissant moins d'un mois pour trouver un appart en Ile de France (faciiiiile) et déménager illico presto. On me dit "tu verras, y a une super ambiance parmi les profs de ZEP" ou "surtout il ne faut pas le prendre à coeur, il faut avoir vachement de recul" ainsi que "n'espère pas faire cours : l'objectif c'est que l'heure se passe bien, si t'arrives à les garder en classe sans que ça dégénère tu as gagné". J'ai aussi entendu "Quand tu entres dans ta salle, tu as 10mn pour marquer TON territoire. Ca ne doit jamais devenir le territoire des élèves. Si les élèves gagnent ce combat, tu vas souffrir pendant un an".

Viennent ensuite les questions habituelles "Eh, t'as vu Entre les murs ?" et "Eh, t'as vu La journée de la jupe ?"
Nan j'ai pas vu ces putains de films, foutez-moi la paix. Ce que j'ai vu, c'est la liste de tous les collèges classés "plan violence" d
ans l'académie, et là je peux dire qu'il y en a un paquet...


dimanche 15 mars 2009

Des journées comme ça

Hier Alain Bashung meurt, au même moment j'achète une voiture et tombe amoureuse du vendeur. Il y a des journées comme ça, tout va de travers.
Ça avait pourtant bien commencé. J'ai fait le tour des concessionnaires, journée portes ouvertes oblige. Je sers les habituels "Ahlalala je sais pas, j'hésite... Vous savez, c'est ma première voiture, et vous concurrents me font une meilleure offre...." Puis je vais chez le concurrent et je redis la même chose, jusqu'à faire baisser les prix.
Et là, je tombe sur un jeune-homme charmant dans tous les sens du terme. Je pourrais passer des heures à trouver des qualificatifs, mais pour faire simple on pourra dire qu'il correspond à 100% à mon idéal masculin. En fait, jusqu'à présent je ne pensais pas avoir d'idéal masculin et trouvais même l'idée stupide. Mais je n'avais pas encore rencontré "Machin". Quand il m'a
vue, il a vite compris qu'il lui serait utile d'user de tous ses charmes pour me convaincre.
Oh, il n'avait pas grand chose à faire de toute façon. Un sourire modeste et une petite blague et c'était gagné. Tout l'art du commercial : faire croire qu'on laisse une liberté totale au client, aller jusqu'à vanter les mérites de ses concurrents, le meilleur moyen pour que le client vous estime "honnête" et revienne vers vous au final.
Faire croire au client qu'on lui fait une fleur exceptionnelle, qu'on va se faire engueuler par le patron mais qu'on lui fait quand même la remise... Et quand on est au téléphone avec ledit patron, flatter le client en disant des choses comme "Et la cliente est charmante, elle est étudiante, il faut
l'aider !" ('tain j'ai une gueule d'étudiante... tu m'étonnes que mes élèves soient familiers avec moi)
Et là j'ai honte mais je n'ai pas réussi à ne pas me faire avoir. C'en était trop. Le sosie français de Wentworth Miller mais en moins poseur qui vous qualifie de "charmante", il m'était impossible de ne pas craquer. Seule avec le beau gosse dans la concession illuminée par le soleil qui a enfin fini par percer, je me sentais apaisée.
C'est un peu comme le syndrome de Stockholm : je tombe amoureuse du tortionnaire qui vide de façon cruelle mon compte
en banque. Mon côté masochiste qui ressort encore une fois. Après il a fallu choisir la couleur de la voiture. Alors on a fait un tour dehors pour regarder les différentes teintes au soleil, mais le nuancier en mains, c'est la couleur des yeux du jeune-homme que je redécouvre. Ils avaient l'air bleus mais en fait ils sont verts. Avec un sourire en coin, je glisse "ah oui, au soleil c'est autre chose quand même". Dehors il fait bon. On parle de météo. Le jeune-homme est détendu, il a fait une affaire aujourd'hui. Quant à moi, je fonds comme un côné glacé sorti du réfrigérateur.
Retour dans son bureau, on plaisante, puis je signe et me dirige vers la sortie, il m'accompagne dehors, je suis éblouie pa
r le soleil. En baissant les yeux vers la flaque poisseuse que je devenue, il dit qu'il ira peut-être faire du vélo après avoir fermé boutique. Moi aussi j'aurais aimé faire du vélo par ce temps-là. Là je me dis que si je ne m'étais pas liquéfiée j'aurais déjà tenté quelque chose, ou au moins jeté une perche, mais je ne suis pas assez audacieuse pour me lancer à la conquête d'un commercial charmeur et manipulateur qui a été recruté pour ses beaux discours et son physique avantageux, qui selon toute probabilité doit vivre depuis six ans avec une fille au physique de top model qu'il a rencontré à son club de gym.
Alors il me dit "à bientôt !", me tend une main que je m'empresse de saisir. C'est l'heure de le quitter, alors je m'en vais mais me retourne une dernière fois pour le saluer en secouant la main comme je le ferais si c'était un ami, et lance "bonne soirée !" avec un grand sourire avant de retrouver ma morne existence, un poids en moins sur le compte en banque mais un poids en plus sur le cœur.

Le soir, c'est concert. Comme d'ha
bitude j'y vais toute seule, j'achète trois tickets pour commander des bières, et je me promène d'une salle à l'autre. J'évite des jeunes ados surexcités qui regrettent que "personne ne pogote", déplorant que "c'est même pas marrant". J'ai un pincement au cœur lorsque je compte qu'il y a cinq ans j'étais à leur place, mes premiers concerts, déjà seule. J'étais alors pas loin d'être la plus jeune du public, et j'avoue que j'en retirais une certaine fierté. Maintenant je ne découvre plus les groupes locaux car je les connais déjà. Je me fais d'ailleurs la réflexion que je les ai découverts dans des salles qui sont maintenant fermées. Misère... J'me fais vieille, je pense au passé. Chercher une bière, me frayer un passage dans le public, me renverser une bonne partie de la boisson dessus à cause d'un inévitable coup de coude, ces gestes sont devenus des réflexes. Mais toujours silencieuse. Personne à part le videur ne me parle. D'ailleurs je ne parle à personne non plus. C'est d'une logique infaillible. Je me contente d'écouter les chansons des groupes locaux, mais j'ai plus l'impression d'écouter des reprises d'artistes dont ils sont fans que leurs propres compositions.
On est en mars. Bientôt je déménagerai. Je m'installerai quelque part en Ile de France. J'irai seule à d'autres concerts voir d'autres groupes locaux. Ça ne me changera guère d'ici finalement. Et au moins j'aurai
une voiture. Couleur "sable bivouac". Comme sa veste.

mardi 10 mars 2009

Bon trimestre, mais un certain manque de maturité...

Mes élèves, dimanche après-midi, en ouvrant leur agenda : "Eh meeerde, y a un contrôle de physique demain, j'ai complètement zappé !! "
Moi, dimanche après-midi, en ouvrant mon agenda : "Eh meeerde, faut que je prépare un contrôle de physique pour demain, j'ai complètement zappé !!"

Pendant ledit contrôle :
Un élève : "Madame, j'ai oublié ma calculatrice, je peux utiliser la calculatrice de mon I-phone ?"
Moi : "Ah bon, y a une calculatrice sur l'I-phone ?"
L'élève : "Ben oui !"
Moi : "Ah oui, tiens, c'est marrant ça... Tu es sûr ?"
Un autre élève, toujours pendant le contrôle : "Mais oui, c'est vrai madame, j'vous jure ça fait calculatrice"
Moi : "Ah ben ok, ça m'étonne un peu, mais bon, puisque vous le dites"
L'élève : "Et alors, je peux sortir mon I-phone ?"
Moi : "Euhh, ben je préfèrerais pas, non... Bon allez, silence maintenant einh !"

Moi, pendant un autre cours : "Et alors, cet atome il dit à l'autre atome : ouais vas-y, donne-moi ton électron ! Donc l'atome qui a piqué l'électron de l'autre, ben il se retrouve avec un signe - et il est content, il est devenu un anion.... Vous avez compris ?"
Les élèves : "..."


Moi : "Et donc un oscilloscope c'est comme l'appareil qui vérifie les battements du cœur de quelqu'un, comme dans Urgences ou Dr House vous savez, quand le gars est mort y a un point qui se déplace sur l'écran en faisant tuuuuuuuuuut ben là c'est pareil sauf qu'au lieu de brancher un gars dessus, on branche une pile de 4,5V, bon c'est sûr, c'est beaucoup moins palpitant.... et ça fait pas de t
uut ..."
Les élèves : "..."

samedi 7 mars 2009

top 6

Le top 6 des plans pour éviter de voir quelqu'un le soir tout en se donnant bonne conscience :

n°6 : envoyer des SMS puis "oublier" d'allumer son portable pendant tout le week-end et ne pas répondre aux mails, puis s'excuser le lendemain en prétextant qu'on était "cloué au lit par une crève" Ce n'est pas la solution la plus élégante je le concède...

n°5 : invoquer une excuse qui fait sérieux mais qui est en même temps invérifiable. Exemple : "je peux pas, j'ai un conseil de classe" ou "je peux pas, je suis de garde en oncologie".

n°4 : donner la confirmation d'un rendez-vous quinze minutes avant ledit rendez-vous, sachant que la personne habite à trente minutes en voiture dudit lieu de rendez-vous.

n°3 : inviter la personne chez soi, sachant qu'on habite un coin difficile d'accès, et non déservi par le tram ou le bus après une certaine heure.

n°2 : proposer des heures de rendez-vous incongrues qui emmerdent tout le monde, si possible autour des heures de repas du genre 18h30 ou 20h, surtout si la personne en question a une vie de couple ou de famille.

n°1 : prétendre qu'on a juste quelque chose à faire "en vitesse" avant le rendez-vous, tout en laissant comprendre que ça va prendre des plombes, histoire de décourager la personne qui s'imagine déjà faire le pied de grue dans le froid. Exemple "Ça marche ! Il faudra juste que je trouve un cadeau d'anniversaire pour Machin, bon, j'ai pas trop d'idée là mais je trouverai bien quelque chose..."

Je précise que c'est du vécu...
Ça fait en effet quelques semaines que quelques personnes et moi jouons à ce jeu-là, sans qu'on admette qu'on n'en a pas grand chose à foutre de savoir ce que les autres deviennent. On se renvoie la balle et les excuses, reste à savoir combien de temps la partie durera.