lundi 18 octobre 2010

Fatiguée

Je suis fatiguée. Malade depuis samedi, je suis enroulée dans un plaid orange fluo, recroquevillée devant mon ordinateur ou devant la télé. Ce matin je me suis quand même pointée au boulot. La plus grande connerie du siècle. Comme j'étais faible je me suis simplement faite bouffer toute crue par mes monstres. Je m'en suis pris plein la gueule et comme je n'avais pas l'énergie de me battre, deux élèves m'ont littéralement gueulé dessus à la fin de mon cours. Alors j'ai fait un rapport, demandé une exclusion d'une journée pour une élève, suis allée à l'administration et ai dit simplement "Je rentre chez moi..." après une seule heure de cours.
Je n'ai plus envie, je sature.
De toute façon si on n'est pas à 200% on se fait pourrir.
Rendez-vous chez le médecin. Compatissant, il m'a mise en arrêt maladie jusqu'aux vacances. J'ai envie de partir. Loin. De m'enfuir de ces pétasses qui me provoquent à longueur de temps.
Me cacher quelque part pour oublier. "Le soir, il faut boire" m'a recommandé le médecin à qui je confiais que j'avais du mal à dormir, étant préoccupée et stressée par le travail. Boire, oui, comme tous les vendredis soirs, soulagée par l'arrivée salvatrice du week-end. Et dormir. Et courir loin loin loin. Je vois Jean-Pierre Léaud qui fuit vers la mer pour tenter de sortir de cette spirale de galère dans laquelle il est, mais une fois arrivé au bout de sa course... eh bien quoi faire ?

dimanche 10 octobre 2010

Vendredi soir à 23h30, assise sur les marches d'une maison pas loin d'une cité quelconque de Vitry-sur-seine je me renverse un verre de ti' punch sur le pantalon, rhum et citron vert imbibent mon jean et ma chaussure droite. C'est la deuxième fois dans la journée que je me renverse un truc dessus. Je suis fatiguée. A la même heure en Alsace ma sœur perd les eaux. Je recommence à fumer et je recommence à glander. Je recommence à être désorganisée et à rêver.
Quelque part je me suis prise d'affection pour un élève qui s'est enfin fait virer, pour la sixième fois, toujours le même motif : insulte et violence envers principal adjoint. J'étais là, c'était dans mon cours. Bizarrement il n'avait rien à faire là puisqu'il était déjà provisoirement exclu et pourtant il est venu. Je n'ai jamais eu de problème avec lui, déjà parce que je suis une femme et que lui ce qu'il ne supporte pas, ce sont les hommes, et en particulier les hommes qui essayent d'avoir de l'autorité sur lui. Un père décédé et une mère démissionnaire y sont sûrement pour quelque chose. Moi je suis inoffensive, il n'y a aucune rivalité possible puisqu'il est 10 fois supérieur à moi, pas de combat de coq possible. Il fait du catch, se balade avec un cutter, il a un casier judiciaire long comme mon bras, il deale, arrache les portables dans la rue, se bat avec les flics... Mais moi il m'aime bien. Alors quand je le vois traîner devant le collège, j'ai juste envie de l'adopter. Sa vie est tellement merdique que je ne comprends même pas pourquoi il se pointe au collège avec quelques stylos, quelques feuilles de papier, et qu'il prend quelques fois la peine d'écrire. Mais bon, maintenant qu'il a traité l'adjoint de "tapette" et de "connard" la question ne se pose plus. Ceci dit, je pense quand même à lui...
Aujourd'hui j'ai encore rêvé puisque, traînant un peu par dépit sur un site de "rencontres" (argh j'ai honte j'ai très très honte j'ai atrocement honte) un type entre en contact avec moi et me propose de le voir cette aprèm, pour se balader dans Paris. Trouvant ça un peu fou mais original je suis tentée d'accepter l'invit mais bon, je lis quand même sa "fiche" et là je me rends compte que c'est quelqu'un de "connu" (bon ok moi son nom ne me disait rien au départ). Pendant un un moment mon fantasme d'ado refait surface, celui du manga Nana (en deux mots, une fille normale, fan d'un groupe de musique, qui finit par se marier avec un des membres du groupe parce qu'il flashe sur elle) et puis bon, je finis par me rendre compte qu'il doit bien avoir 2000 amis sur facebook et que tout le monde doit lui courir après. Donc finalement je réponds que ça va pas être possible dans l'immédiat là tout de suite. Il ne m'a bien évidemment jamais répondu, peut-être a-t-il réussi à brancher la suivante sur la liste. Tout ce que j'aurais eu à y gagner c'est le plaisir de pouvoir frimer en racontant à tout le monde que j'ai côtoyé Machin, mais si tu sais, le producteur de Bidule. Et encore, il aurait fallu raconter comment je l'ai rencontré, et je ne suis pas sûre que j'aurais assumé. Bref, après avoir rêvé quelques heures je suis retombée sur mes papattes, traitant mentalement ce monsieur de gros connard dragueur, me disant "ha, tu vaux quand même mieux que lui" mais pensant "bouhouhouuuuu t'es vraiment une déglonfléééééée".
En attendant, ma soeur vient d'accoucher, moi je suis toujours seule à rêvasser chez moi au lieu de travailler, et j'entends la voix de Morrissey "I'm not happy and I'm not sad"

mardi 7 septembre 2010

Rentrée_bis

Aujourd'hui c'était la rentrée, j'ai cueilli mes petits monstres au petit matin... et j'ai adoré ça.
J'ai été sèche, j'ai été moqueuse, j'ai été incisive, aussi aiguisée qu'une lame de rasoir, j'ai été méchante, j'ai été salope même.
Ok c'était facile, c'était la première heure de leur journée et pour une classe, la première fois qu'ils me voyaient. Pour la première fois en un an je suis contente de moi : j'ai cassé Ahmed, j'ai détruit Amine, et Maxime n'a même pas moufté, il s'est contenté de bailler. Eh oui, je deviens méchante, il faut dire que je m'en suis pris tellement plein la gueule l'an dernier, j'ai tellement dû batailler que cette année il est simplement hors de question de me laisser marcher sur les pieds par ces petits merdeux. En plus de ça, je suis contente car j'ai constaté que beaucoup de mes 4è (donc mes anciens 5è) se rappelaient bien de ce qu'on avait fait en électricité l'an dernier, une éternité à l'échelle d'un collégien. Du coup je le leur ai dit "Ah, finalement il vous reste quand même des choses, c'est bien, je suis contente..." le tout avec un air glacial (faut pas déconner).
Ah ils en ont bien profité du fait que je sois nouvelle l'an dernier, mais ça va changer les cocos, d'abord on dit "Bonjour Mme P." et "Au revoir Mme P." ha, j'vais vous apprendre la politesse moi !! Cette année Mme P. c'est une salope sadique et odieuse, faut pas la chercher mes chéris. Quand vous la connaîtrez mieux vous saurez qu'au fond elle est bienveillante mais pour ça faut se tenir à carreau, et marcher droit !
Pourvu que ça dure...

Le reste ça ne dépend pas de moi, avec une administration de merde qui ne vire même pas un élève qui a traité son prof de maths de "fils de pute" sous prétexte qu'il était trop tard dans l'année pour un conseil de discipline. Résultat, le jour de la rentrée le même zozo a sorti à la nouvelle prof de svt "C'est vous la nouvelle ? Vous allez morfler !" Eh oui, je pense qu'on va tous morfler...




lundi 6 septembre 2010

dimanche 22 août 2010

Partir

Je viens de passer dix jours en Irlande. Dix jours au cours desquels j'ai d'abord été jalouse, frustrée, complexée, déprimée à cause de l'autre fille qui est partie avec moi et à côté de qui j'avais l'impression d'être un pot à tabac inintéressant. Comment lutter contre une fille bâtie comme un mannequin qui fait le paon devant tout ce qui porte une paire de testicules et qui monopolise l'attention de tous ? J'ai failli m'enfuir en courant dans les rues de Temple bar pour me perdre à jamais dans Dublin, loin d'elle. Fuguer comme une ado désirant regagner l'intérêt de ses parents.
Et finalement lorsque j'étais à deux doigts de craquer, mon ami F. m'a fait un clin d'œil, un sourire complice et j'ai tout de suite été apaisée comme par magie. Il est ma morphine et je l'aime pour ça. Nous avons donc passé la plupart du reste du séjour ensemble, avons conduit à gauche tour à tour pilote ou co-pilote, allant d'éclats de rire en fous rires, nous avons marché sous la pluie le long des côtes irlandaises puis crapahuté dans les falaises de la Chaussée des géants. A un moment il a coincé une pièce dans un des interstices des orgues basaltiques pour faire son vœu. Celui de pouvoir revenir un jour ici avec ses enfants et leur raconter qu'on y était en 2010. Au sommet de la falaise, me voyant me pencher, il m'a dit "Je n'imagine même pas pendant combien d'années je ne pourrais plus vivre si tu tombais là sous mes yeux". La plus émouvante déclaration d'amitié que l'on m'ait jamais faite... Ce que j'aime chez lui c'est qu'il n'a pas honte de dire qu'il est ému, il ne cherche pas systématiquement à tourner tout en dérision par peur de dévoiler ses sentiments comme moi. Il n'a pas peur d'être ridicule lorsque ce qu'il dit est simplement beau.
Aujourd'hui je regrette de ne pas lui avoir sauté dans les bras il y a huit ans lorsque nous étions au lycée et tous les deux célibataires. Je pense que j'aurais été heureuse avec lui, tout simplement. J'ai tellement confiance en lui que j'aurais fini par être bien dans ma peau, je n'aurais peut-être pas gâché toutes ces années et perdu tout ce temps à être complexée.
Maintenant une grande affection existe entre nous, je suppose qu'il me considère comme sa petite sœur même si notre relation me paraît parfois ambigüe : depuis des années nous avons vécu ensemble des moments forts et romantiques, des voyages, des couchers de soleil et des balades qu'il aurait très bien pu offrir à une de ses chéries. Nous avons aussi partagé la même chambre en vacances puis le même lit chez une amie, de nombreux repas et tout ceci toujours "en tout bien tout honneur" même si je prenais secrètement un plaisir fou à constater que nous étions en parfaite harmonie.
Aujourd'hui quand je nous vois nous comporter parfois comme un vieux couple je m'en veux tellement de ne pas avoir pris de risque...

A y réfléchir je n'ai jamais pris de risques et maintenant je le regrette également. Je sens terriblement le renfermé, il a fallu que je passe ces quelques jours à l'étranger pour prendre conscience que, malgré ce dont j'essaye me persuader, je ne suis pas "heureuse". Je n'avais plus envie de reprendre l'avion pour rentrer, je me suis dit "bon sang mais c'est ici que j'ai envie de vivre, ici les gens sont adorables, les paysages magnifiques, et j'ai tellement envie de me remettre un peu à l'anglais !" C'est bizarre mais aller me perdre toute seule en Irlande me semble maintenant plus facile que de rentrer à Paris. Alors en rentrant chez mes parents j'ai tout de suite regardé sur Internet comment faire pour me barrer à l'étranger mais évidemment c'est extrêmement compliqué et bien sûr ne parlons pas d'aller en Irlande, c'est quasiment impossible. J'ai donc pensé à d'autres stratégies toutes aussi farfelues, démissionner (une folie), me marier avec un irlandais pour me trouver un poste là-bas, me donner à fond comme une dingue pendant des années dans mon boulot pour me faire bien voir mais actuellement les mots "implication" et "travail" ne s'associent pas forcément dans mon esprit. Pourtant en ce moment je peux difficilement tomber plus bas dans ma "carrière", je commence à zéro, je suis encore jeune, c'est comme qui dirait maintenant ou jamais.
Là-bas j'ai enfin trouvé un peu d'air, je me suis sentie à l'aise, forte et indépendante. Ici j'étouffe, je ne suis pas épanouie et pourtant quand j'ai quitté F. et L. l'autre soir, mes compagnons d'Irlande et "amis" les plus précieux que j'ai ici et que je ne reverrai pas avant huit semaines, j'avais l'impression qu'on m'arrachait un bout de cœur, un morceau de ma chair. Ce que je n'arrive pas encore à savoir c'est si ce morceau est en train de pourrir dans les regrets et s'il est nécessaire de l'ôter pour enfin commencer quelque chose de beau et de sain.

Je n'en suis pas encore là. Peut-être les vacances prochaines oserai-je partir toute seule un mois ailleurs...


jeudi 15 juillet 2010

Merde fait chier j'ai honte

Et merde.
Je suis triste, voilà et j'ai même pas envie de savoir pourquoi. J'ai commencé à y réfléchir en voiture et puis finalement ça m'a gonflé. Toujours tenter d'analyser pour comprendre ce qui me rend triste afin de le surmonter et d'aller mieux ça suffit. Ça faisait longtemps que je n'étais pas triste alors maintenant j'ai envie d'être triste, voilà. Oh, comprendre pourquoi est facile : je suis triste parce que je suis jalouse voilà tout. Je suis jalouse de tous les couples autour de moi, de ma sœur qui s'est mariée et de ma collègue et néanmoins bonne amie qui m'a enfin dit qu'elle était officiellement en couple avec un autre collègue et néanmoins ami. Oui je suis totalement jalouse car tout le monde s'intéresse à elle et qu'il semblerait que moi je n'intéresse personne. Triste et énervée parce que celle que je considérais comme "allumeuse" s'en sort super bien et se tape même celui que je considérais comme un mec vraiment bien. D'accord il ne fait pas que se la taper il a clairement flashé sur elle et après un travail de plusieurs mois a réussi à la séduire. Maintenant je n'ai même plus envie de leur parler tous les deux car ils m'énervent et me dégoûtent.
Je suis triste car j'agis comme une gosse à qui on a piqué le garçon avec qui elle s'entendait bien. Je suis jalouse comme l'ado coincée qui voit ses copines bien dans leur peau sortir avec tout plein de mecs tandis qu'elle-même joue la confidente et tient la chandelle.
Je suis triste aussi parce que je constate qu'à 25 ans je n'ai pas évolué, je suis toujours cette ado coincée qui rêverait d'être une fille bien dans sa peau qui sort avec tout plein de mecs et qu'en même temps je trouve pathétique les gens qui agissent ainsi. Ou est-ce encore de la jalousie ?
Et quelque part je suis triste car j'ai honte d'avoir comme principale préoccupation le fait d'être célibataire et que je n'aimerais pas passer pour la nana superficielle de service qui écrit dans son journal intime qu'elle cherche un putain de prince charmant de mes deux. D'autant que je trouve que ce sujet revient beaucoup, je tourne en rond, même moi je m'ennuie, je ne sais plus écrire, ça me désole, je n'ai plus aucune inspiration que ma propre personne et mes propres petits soucis banals.
Et enfin je suis triste car même sans vouloir analyser le fait d'être triste je cherche une explication que je développe en long et en large sur mon blog alors que si ça se trouve ça n'est même pas la bonne explication.
Je suis aussi triste car je ne peux pas m'empêcher de m'en tirer par des pirouettes alors que ça me fait vraiment chier.

Eh oui, A. qui me dit "Je suis avec Chris." cette nouvelle m'a foutu le moral à zéro. D'autant que maintenant je ne fume plus, je bois bien moins qu'avant (depuis que j'ai été malade comme un chien après une beuverie je suis comme dégoûtée de l'alcool).
Putain ma vie est complètement chiante et ça me rend triste. D'autant que celle des autres semble l'être nettement moins.
Fait chier. J'ai honte. Je suis triste.

samedi 3 juillet 2010

Décompresser

Je ne verrai plus jamais les toilettes du collège du même œil depuis que j'y ai dormi une bonne heure (après avoir vomi), la tête contre la cuvette à deux doigts du coma éthylique lors de la fête de fin d'année traditionnellement nommée "soirée boucherie". Je ne verrai plus la salle des profs du même œil depuis que j'y ai émergé à 5h du matin, me demandant ce que je foutais là et ne me souvenant pas de tout avant de rentrer chez moi à pieds et d'y agoniser pendant au moins 20h avant de voir une lumière au bout du tunnel.
Cette année au moins, les voisins n'ont pas appelé les flics...


lundi 28 juin 2010

Fantasme de vacances

Une collègue et néanmoins amie pour qui l'arrivée avec son copain (lui aussi prof) en banlieue parisienne a été un traumatisme a rapidement demandé sa mutation dans l'académie de Dijon (rêvant de nature, d'une maison avec son amoureux et d'espaces verts où promener son chien), mutation qu'elle a obtenue grâce à son Pacs. Seulement depuis elle s'est fait des amis ici, elle s'est habituée à nos élèves un peu chiants, elle a pris goût à la folle vie parisienne, et surtout, elle est en train de se séparer de son homme. Résultat, elle se retrouve à devoir déménager toute seule dans une ville où elle ne connaît personne, condamnée à être remplaçante un peu partout (c'est très difficile d'obtenir un poste fixe dans un établissement de nos jours). C'est ainsi qu'hier elle regardait à contrecœur les annonces de locations de studios à Dijon. Comme elle m'en parlait, j'en ai profité pour comparer les tarifs à Paris, et de fil en aiguille j'ai changé les critères jusqu'à aller vers mon ancien fantasme : un logement au sud de la France. Je le vois très bien : une cuisine avec terrasse exposée à l'ouest, un salon exposé au sud et une chambre à l'est. Le soleil qui entre à travers des volets. Dehors, des "ksss ksss ksss ksss ksss", des herbes hautes qui me feront éternuer en été, le vent qui transporte des odeurs de lavande, la plage à moins d'une heure de route...
Déjà petite j'étais émue par cette chanson de Nougaro "Tu verras tu verras tu l'auras ta maison avec des tuiles bleues". A l'époque cela me semblait possible, du moins pas totalement improbable mais malheureusement maintenant c'est devenu plus que compromis. Ou alors comme tout le monde, je fais le choix de tout recommencer à zéro ailleurs : "all-in". Elle aura intérêt à être belle cette maison...

mercredi 23 juin 2010

courage et soleil

Et voilà, déjà la fin de l'année. Finalement c'est passé vite. Je me suis beaucoup faite avoir, j'ai commis pas mal d'erreurs mais j'ai aussi eu des petites victoires. Et surtout j'ai appris plein de choses et ça m'a fait du bien. Je me sens mieux. Mes erreurs m'ont fait me poser des tas de questions sur moi-même. Il faut être assez courageux pour cela. Bien sûr j'ai toujours admis avoir tort, mais mon problème c'est que quelquefois je faisais les choses de travers tout en sachant pertinemment que c'était "mal". J'en suis arrivée à me détester, puis à me demander pourquoi je me détestais, et si finalement je n'agissais pas "exprès" ainsi. Pourquoi je fonçais délibérément dans le mur.
Et j'en ai tiré qu'en fait j'étais une trouillarde, que j'avais peur de l'échec, peur d'être obligée d'admettre que je n'étais pas à la hauteur. Comme ces élèves qui préfèrent rendre copie blanche systématiquement en frimant plutôt que de prendre le risque de se planter. Finalement je ne suis pas tellement plus évoluée qu'eux. A la rigueur je "préférais" faire mal les choses que de tenter de bien les faire et de me prendre une gamelle. Un jour au téléphone, je disais "En fait je n'ose pas les engueuler car j'ai peur qu'ils me rient au nez, j'ai peur de ne pas les impressionner, j'ai peur de me ridiculiser..." Exercer son autorité c'est une prise de risque quelque part : le risque de faire un flop et j'avais peur de faire un gros flop irréversible alors je ne me suis pas lancée. Je préférais passer pour la prof trop sympa que pour la prof qui n'a pas d'autorité. Vu comme ça c'est la même chose, et pourtant il y a une sacré différence : dans le second cas, on a essayé d'être sévère mais en vain, ce qui est pire que de n'avoir jamais essayé. Il m'a quand même fallu un sacré bout de temps pour comprendre que dans les deux cas on se fait bouffer.
Maintenant que j'ai eu le courage de comprendre et d'admettre cela il va falloir que je trouve le courage d'y remédier plus sérieusement. Mais pour l'instant je fume une clope dehors, les seules dix minutes de bonheur pendant lesquelles quelques rayons de soleil arrivent à atteindre mon balcon exposé plein nord avant que l'astre se cache définitivement derrière un autre immeuble. Il faut bien viser. Dix minutes de paix. Mon royaume pour une terrasse sur le toit d'un haut immeuble exposé au sud-ouest sur laquelle je pourrais prendre l'apéro pendant des heures...
Vendredi à 15h20 les quelques élèves de 3èC qui n'auront pas séché vont crier, balancer les tabourets sur les tables de ma salle pour la dernière fois de leur vie avant de partir en courant et en hurlant dans le couloir, et moi je marmonnerai "Bonne vacances" et je penserai "Allez-y, faites votre vie, l'avenir vous appartient les loulous. Vous allez devenir des gens biens. Sauf lui, là, non lui c'est vraiment un connard... Bon débarras tiens."
Je suis fatiguée et je mérite vraiment de me reposer. Le repos du jeune guerrier.
Dans deux semaines je "rentre"...

mardi 25 mai 2010

Des verres et la mer

Je casse beaucoup de verres en ce moment. Encore tout à l'heure au collège j'ai explosé un "bécher" qui en fait est un pot de yaourt en verre. C'est beau un verre qui se casse. Pendant la chute on anticipe la phase finale, on voit l'objet tomber au ralenti, comme suspendu dans les airs mais on est impuissant. Et vient le choc contre le sol : cassera, cassera pas ? Le fameux bruit du verre cassé : j'adore. D'autant que dans ma "carrière" de chimiste, j'en ai pas mal cassé du verre. Un verre qui se brise réserve toujours des surprises quant à la forme finale qu'il prendra. Enfin il faut partir à la recherche des petits morceaux éparpillés un peu partout. Mais souvent c'est "propre" : des grands morceaux bien taillés, brisés nets. Parfois je ne peux pas m'empêcher de vérifier leur tranchant en griffant ma peau avec un morceau : je suis toujours impressionnée de voir à quel point un morceau de verre bien taillé coupe très bien et de façon extrêmement précise.
Le week-end dernier je suis allée voir la mer avec une collègue et néanmoins amie. Tout lâcher, le boulot, les emmerdes, les prises de tête, pour rouler vers l'ouest jusqu'à ce qu'on ne puisse pas aller plus loin, jusqu'à ce qu'on n'entende plus que le bruit de l'eau qui se brise contre les rochers. La liberté, enfin. Plus envie de casser des verres pour qu'on m'écoute mais une amitié qui se consolide, comme un amour de vacances.
Et sinon l'ennui. Je claque mon fric dans des verres, des cafés et des tickets de métro : c'est facile à Paris. La routine, le temps qui passe, les cours et entre les cours, les rades, les bises, les soirées et les gueules de bois. Les verres en plastique ne se cassent pas eux : ils se vident à moitié puis se perdent et se confondent. Au milieu des verres et des béchers, la fatigue, la petite déprime, l'impression de se battre contre des moulins à vents et le vague pressentiment que tout cela va mal finir. Mon avenir n'a jamais été aussi incertain : pourrai-je un jour aller ailleurs et trouver quelque chose de mieux ? Cela semble mal parti d'après la tournure que prennent les événements.
A Paris on a du mal à voir un horizon, sale ville pour les hypermétropes. En allant voir la mer je pensais y voir plus clair mais les nuages au loin n'annonçaient rien de bon. Après il y a eu la pluie mais
pour un instant, du haut de la falaise, j'ai réussi à tout jeter à la mer : verres, angoisse, remords, nœuds dans le ventre, nœuds coulants...

mercredi 12 mai 2010

Dans la farine

En ce moment je souffre. Hier je me suis fait marcher sur la gueule presque toute la journée par des petits connards de 13 ans. Huit heures de cours ont ainsi mis à mal mon système nerveux fragile. Alors certes, j'exagère, tout ne s'est pas complètement mal passé, et pour dire la vérité c'est surtout une seule heure qui s'est véritablement mal passée. Nez à nez avec des gamins hostiles qui accumulent les provocations pour me déstabiliser et m'embêter, méchanceté à l'état pur (comme le gamin qui veut me voir tomber dans les escaliers pour se débarrasser de moi...) J'ai donc de plus en plus de mal à dormir, je me couche hyper tard, je rêve du collège, je me réveille très énervée, je ressasse en mangeant mon petit déjeuner, je rumine en me préparant. Je suis nouée, nauséeuse, je frissonne, j'ai presque envie de vomir. Ce matin je rêvais de déconnecter mon cerveau. Au moins être peinarde pendant quelques heures... Je manque de sommeil c'est évident, je suis plus irritable et plus je suis irritable moins ça va.
Je suis tellement plongée dans mes pensées, me mettant virtuellement en scène pour trouver les mots justes que je vais dire à la classe qui ne "m'aime pas" mercredi prochain, imaginant toutes les réponses et les scénarios possibles, qu'en sortant de ma salle de bain je n'étais même pas sûre d'avoir vraiment pris une douche. Tout ce que j'avais envie de faire c'est de ramper devant le premier médecin venu pour le supplier de me filer des somnifères.

L'ambiance est électrique au collège en ce moment, les gamins se font exclure de cours par wagons entiers, jusqu'à ce midi où un règlement de comptes a éclaté devant le collège (parce que Youssouf a cassé la gueule du frère de Nadine donc la famille de la victime est évidemment venue l'attendre à la sortie pour lui casser la gueule en retour) ça faisait longtemps qu'on n'avait pas vu les gars de la BAC...
Alors pour me réconforter je téléphone à mon beau-frère, à mes parents. Mais le problème c'est que mes parents, en tant qu'anciens profs, ont plus tendance à me donner des conseils qu'à me réconforter. Sauf que des conseils, je ne peux plus en entendre car le seul effet c'est de me faire davantage culpabiliser. Après m'être fait marcher dessus toute la journée je ne peux simplement plus entendre "Mais tu dois être plus sévère, là ils te roulent dans la farine !!". Alors pour la première fois de ma vie, j'ai raccroché au nez de mon père, ultime sursaut de survie et j'ai passé toute la soirée à frissonner devant la télé, voyant des images défiler sans les regarder.

dimanche 9 mai 2010

Iiiiiih je meurs...(groarrr)


vendredi 30 avril 2010

Last night I dreamt that somebody loved me...

Hier j'avais rendez-vous dans un bar près du campus pour boire un verre avec celui que j'appellerais mon "meilleur ami" depuis le lycée. J'ai donc traversé tout le campus, jetant des regards attendris et nostalgiques vers les étudiants prenant le soleil et fumant des cigarettes roulées "Fleurs du pays". Les membres de l'amicale de chimie avaient déjà sorti la colonne de bière à 15h et s'employaient à la descendre tout en commentant les cours ou en imitant leurs profs. Au fil des différents bâtiments du campus que je longeais, des souvenirs jaillissaient et me faisaient sourire malgré moi. Ainsi me sont revenues en mémoire mes longues journées enfermée dans un laboratoire de chimie, oscillant entre le fou rire et les larmes lorsque j'obtenais, au terme de la dizaine d'étapes du fastidieux protocole de synthèse, une substance indéfinie proche du gloubiboulga qui passait intégralement à travers les trous de mon filtre Büchner dans un bruit de succion tandis que mes voisins récupéraient de magnifiques cristaux dans leur filtre.
D'autres souvenirs de séances interminables d'optique, enfermée cette fois dans les pièces plongées dans le noir alors que le soleil de juin réchauffait la pelouse du parc d'à côté où j'aurais bien aimé bronzer. Ah l'optique, les délires avec ma binôme de travaux pratiques, les acrobaties de mon camarade dans le noir (n'y voyez aucune allusion salace, je parle de véritables acrobaties dignes d'un spectacle de cirque). Puis l'UFR de mathématiques : je visualisais encore parfaitement notre (ténébreux et sexy) professeur de travaux dirigés de géométrie et ses fameux "Plan Q" et "point G" qui nous faisaient toujours autant marrer même post-Bac. Et ce gentil prof d'informatique qui tentait de nous faire créer des petits programmes sans queue ni tête (du moins pour moi) avec Mapple…
Enfin je suis arrivée à la terrasse du bar où j'ai attendu mon ami qui est arrivé une dizaine de minutes plus tard pour me tirer enfin de mes rêves. Quatre heures à discuter à bâtons rompus, quatre heure de pur plaisir, de confidences, de retour en arrière sur notre passé, nos aventures et nos projets. Quatre heures à refaire le monde sans voir le temps passer. J'ai enfin trouvé quelqu'un à qui je peux tout confier, quelqu'un face à qui je me mets à nu en toute confiance et sans avoir peur d'être jugée. Il m'a d'ailleurs raconté un rêve étrange : il était à l'opéra et dans son rêve il a eu la révélation du siècle, celle d'aimer passionnément l'opéra. Une sorte de découverte subconsciente. Depuis il a envie d'y aller. Ce phénomène m'a interpelé, le fait de prendre conscience de quelque chose grâce à un rêve.

Ainsi cette nuit, après l'agréable soirée passée en sa compagnie, j'ai rêvé que je tombais amoureuse de lui, qu'après avoir dormi et couché ensemble on était enfin heureux tous les deux. Pour la première fois je ressentais ce sentiment amoureux qui m'est pourtant étranger. Et ce matin, sentant encore de "vrais bras autour de moi"* c'est avec la sensation d'avoir eu moi aussi la révélation du siècle que j'ai émergé : c'est une évidence que l'on est faits pour être ensemble. Cette nuit j'étais amoureuse de lui ce qui est très étrange puisque jamais je ne l'avais envisagé et que depuis sept ans
je l'ai toujours considéré comme un ami. Pourtant cela devait bien être niché quelque part dans ma tête puisque je l'ai rêvé.
Toutefois après les plombes, habituelles en vacances, nécessaires à émerger totalement, j'ai rejeté l'idée pourtant extrêmement séduisante en rêve, mettant ceci sur le compte d'un moment de faiblesse et de la longue période de vide sentimental et de manque d'affection que je traverse en ce moment. Cette sensation de plénitude que j'ai confondu avec de l'amour s'est lentement évaporée au fur et à mesure de ma journée, laissant place à de la lassitude. N'empêche que je donnerais beaucoup pour pouvoir vivre ce rêve, peu importe l'autre protagoniste.

*Voir paroles de The Smiths


jeudi 22 avril 2010

Soirée de merde

Ça y est il est 2h du matin et je viens de tomber par terre en essayant de m'asseoir sur un siège. Je commence à envisager de prendre un taxi pour rentrer. Je ne me sens pas très bien, ma copine se fout de ma gueule "ouah la chute !". Je m'en veux. Une fois de plus je m'étais dit que je ne rentrerai pas tard, que je serai raisonnable et je me suis encore fait piéger. Tout est allé un peu vite. La rouquine de la dernière fois m'arrache ma pince à cheveux, foutant en l'air mon pseudo chignon, puis bien plus tard dans la soirée elle me renversera ostensiblement tout son verre dans le décolleté. Me voilà obligée de lui emprunter un T-shirt Kookaï à dentelles complètement transparent. Mais pourquoi fait-elle ça ? Je pense que c'est parce qu'une fois de plus j'ai été cataloguée comme la nana coincée qu'il faut absolument décoincer en lui infligeant le bizutage classique de base. Fonctionnaire en plus. Quelle misère.
Mais je m'entends bien avec un de ses potes qui est célibataire. Donc tout n'est pas noir. Soirée débauche, une fille qui vient de se faire larguer tente d'allumer un autre mec. Et tout ça dans un studio de 26m². Puis soudain, basculement, Monday Morning est de retour, je me détache alors de la réalité et observe mon environnement d'un regard extérieur, ne parlez plus à B. elle n'est plus là. J'observe ledit pote célibataire en train de danser avec la rouquine puis avec ma copine. Soupir. Je fais le tour de la table, ceci a pris entre 5 secondes et 15 minutes, je ne m'en rappelle plus, à la recherche d'une bouteille à finir pendant que tout le monde flirte. Les fesses sur le matelas, je m'occupe du chien. J'entends une voix d'homme "tu as l'air toute nostalgique, comme ça, à caresser le chien" mais je ne me souviens pas de son visage. Je pense à Louis Garrel appuyé sur le toit d'un taxi et répondant "Je suis très mélancolique" à la question "ça va ?". Puis j'enlève mes chaussures et me fout sous la couverture. Ma copine me rejoint pas très loin, puis ledit mec célibataire vient se mettre entre nous. Sauf qu'évidemment c'est vers ma copine qu'il se tourne. Quant à moi, je me tourne vers le mur et soupire une dernière fois tout en me battant pour récupérer un peu de couverture. Tout ce que j'aurai gagné de cette soirée, en lot de consolation, c'est le numéro de mon futur dealer.
Le lendemain, après une nuit très courte à quatre ou cinq dans un lit, dont un ronfleur, je rentre par le métro de 7h30 du matin, complètement fracassée, croisant le regard des gens frais et pomponnés qui vont travailler. Moi je suis en vacances, j'ai 24 ans aujourd'hui, je suis prof et je vous emmerde !


jeudi 15 avril 2010

Nouveau message

Plus de notes en deux mois, pourtant chaque jour je pense qu'il faudrait écrire, mais chaque jour je ne sais pas trop quoi dire. Même si en y réfléchissant, il y a deux ans je n'avais pas grand chose d'intéressant à dire non plus et pourtant j'étais plus prolixe. Alors je parlais pour ne rien dire ? Je crois plutôt que je parlais pour mieux ressentir, pour le revivre et le faire partager à travers mes écrits. C'est peut-être ça aussi "grandir", ne plus être nombriliste, ne plus croire que ce qu'on pense intéresse la terre entière tellement c'est original et profond.
Me taire car si je dis ce que je ressens, mettre des mots sur mon sentiment profond me donne envie de pleurer. Mais la fatigue extrême me délie bien la langue, mes vendredis soirs à m'envoyer des cocktails se ressemblent plus ou moins, mes lundis à bailler, mes mardis à enchaîner 8h de cours dans un état second m'épuisent. Alors entre la sixième heure et la septième heure, je vide mon sac en salle des profs. J'ai parfois l'impression d'être un paillasson, essuyer les provocations, l'insolence, ou simplement le mépris... Le fait de ne pas être traitée comme une adulte qui représente l'autorité mais comme un détail, une moins que rien me mine. J'ai presque envie de sangloter, prévoyant que les deux dernières heures vont encore mal se passer comme d'habitude. Mais finalement pour une raison inconnue ça se passe bien et ça m'a réconforté... De la complicité se crée entre certains. Alors qu'en début d'heure personne n'écoute, je lâche faiblement dans un soupir "youhouuu j'existe...." avec un air blasé ce à quoi répond Stéphanie (au premier rang) "Oh madame, ne déprimez pas..."
Cette phrase qui aurait pu m'achever m'a au contraire remonté le moral. Passer enfin du statut du paillasson à celui de l'être humain. Cette année j'ai appris énormément de choses, je ne suis pas encore au point mais j'analyse mieux les situations et je commence à m'en sortir. Évidemment je n'en suis pas encore au point des profs chevronnés qui n'ont jamais ramassé un carnet de correspondance alors que moi je passe mon temps à cela. Je n'en suis pas au point de vanner les élèves, je n'ai pas un sens de la répartie très développé et je marche encore sur des œufs mais je sens que bientôt j'aurai plus d'assurance...

En attendant je croise des bobos et ces petites bêtes me passionnent déjà. Mon nouvel objectif est de réussir à m'incruster dans une soirée bobo d'étudiants à la Sorbonne dont les parents possèdent une villa sur la côte méditerranéenne et je suis plutôt en bonne voie. De toute façon j'ai toujours admiré ces nanas décomplexées qui disent "youpi" à tout tandis que je dis "euhh" à tout. Cette rouquine qui prétend s'être débrouillée pour, dans la même soirée, persuader deux types différents qu'il étaient chacun en couple avec elle me bluffe. Et pourtant elle n'est pas si jolie. "Comment fais-tu ?" lui demandais-je, elle m'a répondu avec un haussement d'épaules.

Sur ce, je vais essayer de me trouver une petite robe, tenue de camouflage si je veux réussir à m'infiltrer dans le monde des bobos branchés. Bientôt les prochaines aventures de Monday Morning qui se bourre la gueule au champagne et y repense avec nostalgie devant un café en salle des profs, faisant abstraction des hurlements des gamins dans le hall.


jeudi 18 février 2010

Vilain petit canard

J'entre dans l'amphi à 13h40 (10mn de retard), je signe la feuille d'émargement et m'assois au premier rang. Suite de la conférence sur la scolarisation des élèves handicapés. L'après-midi s'annonce encore très pénible... Alors je commence mon cirque, je joue à la malade, me tiens le ventre puis la tête, respire par la bouche comme si j'étais sur le point de vomir, simulant tour à tour une gastro et une migraine foudroyante. Au bout de dix minutes de spectacle affligeant, je taxe un Doliprane à ma voisine, et le cachet bien en évidence dans la main, sors de l'amphi à 13h55 pour ne jamais y revenir.
Je m'étais dit "chouette, je vais pouvoir corriger mes copies qui m'attendent à la maison" mais au lieu de cela me voilà à jouer à GTA4. Soudain des cris, pour une fois cela ne vient pas de mon jeu mais de la rue. Un coup d'œil par la fenêtre et me revoilà presque plongée dans mon jeu vidéo mais c'est la réalité. Un type, cinq-six policiers armés, ma rue soudainement bloquée par deux bagnoles de flics. Le type est en-bas de chez moi, j'entends "Enlève ta main ! Enlève ta main !" Puis tout va très vite, d'autres policiers accourent, encerclent le larron qui renverse une poubelle au passage et c'est déjà fini. Beaucoup de violence par chez-moi en ce moment. On me demande "Et dans ton collège ça va ? Vous faites grève ? Pas d'élèves poignardés ?" Du coup je passe pour une sorte d'héroïne.

Il faudrait quand même que je finisse par laver mon écharpe qui sent toujours la bière depuis qu'elle a traîné par terre dans je ne sais plus quel bar, mais ça me fait toujours marrer le matin quand je m'enveloppe dedans pour aller au collège. "Non Pédro, je n'ai pas de cigarette à te filer, et d'ailleurs qu'est-ce que tu glandes dehors, je t'avais pas collé ? Un rendez-vous chez le dentiste à 8h du matin, tu te fous de moi ? Pffff"
J'ai adoré les réunions parents-professeurs, on comprend alors beaucoup de choses.
"Oui alors Djad en ce moment ça ne va pas trop, il m'a déjà mal parlé, et il joue un peu aux....- regard furtif vers le grand frère, un noir en survet tout baraqué qui ressemble à un chef de gang de la cité du coin - euh, il joue un peu aux caïds... hum. Enfin euh, je veux dire, il n'est qu'en cinquième quand même ...héhé..." Nouveau regard vers ledit grand frère, imperturbable qui me fixe avec un sourire de tombeur depuis qu'il est entré dans ma salle.

Lendemain de fête, je regarde vaguement Twin Peaks dans un état proche de l'Ohio, hébétée devant un nain qui danse dans une pièce rouge, me demandant toujours quelle est la signification des interventions de la femme à la bûche lorsque le téléphone sonne. C'est ma sœur, elle m'annonce qu'elle est enceinte. C'est super, félicitations, la grande classe, je ne sais pas trop quoi rajouter. Je me sens un peu minable tout à coup, à me réjouir de mes prochaines soirées à la Lanterne (un bar de Strasbourg). Cette nouvelle me fait comme un choc. Je n'aurai jamais cru il y a quelques années que tout irait si vite pour elle. Et puis d'un coup tout s'est débloqué, à 25 ans elle rencontre un homme, l'homme de sa vie, et à 31 ans elle se retrouve enceinte. C'est formidable. Ma sœur est enceinte, ma mère est enfin comblée, le nain danse toujours dans ma tête, la pièce tourne, tout est rouge, et c'est moi qui vais vomir.
Oh noooon un vilain petit canard tout moche a pointé son cul dans ma ferme virtuelle !

dimanche 17 janvier 2010

in the mood for...

Écouter du rap et avoir envie de pleurer. Revoir La Haine et avoir envie de sauter du balcon. Pourtant jusqu'ici tout va bien... En plus j'ai presque arrêté de fumer. Un peu comme tout le monde au collège.
Je croyais justement être d'excellente humeur, j'avais l'impression d'être épanouie, d'avoir réussi à déconnecter un peu du boulot, et puis au fil d'une conversation au téléphone j'ai commencé à pleurer quand je me suis aperçue que je n'avais pas super bien assuré face à un gamin qui m'avait bousculée dans la cour de récréation. J'aurais dû lui passer un savon et je lui ai à peine fait une remarque.
Je passe mon temps à me remettre en question et à m'autoflageller et ça me détruit. Je me torture, j'ai du mal à me débarrasser de cette vieille angoisse. Et pourtant je vais finir par m'y habituer comme je m'habitue aussi à mon "clapier" et comme je m'habitue à jouer les femmes au foyer toute seule quelques jours par semaine. Ménage, lessive, courses, bouffe, télé, verre de vin. Mais plus j'attends et moins il se passe quelque chose. J'aime mon indépendance mais j'aimerais bien la vivre à deux. Certes c'est une utopie. Je suppose que mon double parfait n'existe pas et qu'il ne me suivra jamais aussi bien que mon ami imaginaire qui me tient compagnie partout et qui est toujours d'accord avec moi. Tandis que je suis écrasée par la fièvre et les nausées dans mon lit, une de mes sœurs se fait charcuter à l'hôpital et mon autre sœur passe l'Agrégation de lettres classiques. Le médecin m'ordonne de manger mais rien que l'idée d'ouvrir le frigo me donne la gerbe. Voir cette bouteille à peine entamée de Chianti me retourne l'estomac. Je crois qu'il va me falloir un long moment avant de pouvoir boire du vin rouge. Ce serait peut-être l'occasion d'en profiter pour arrêter l'alcool (mouahaha).
J'ai toujours rêvé que ma vie ressemble à cette vieille pub pour l'huile d'olive Puget, vous savez, celle où l'on voit une belle et fraîche jeune-femme en jupe qui pédale sur son vélo, quelques pins, la mer, le soleil, les cheveux dans le vent, sa culotte blanche et sur le porte-bagages une bouteille d'huile d'olive dans un panier entre des légumes bien colorés (et en fond "Touuuuuut l'amour que j'ai pour toi ouap douap-douap-douap"). On entendrait presque les grillons.
Je ne sais pas, j'ai toujours assimilé cette image à la définition d'un certain bonheur. Ce qui semble très paradoxal car pour ainsi dire j'ai passé plus de temps dans des endroits glauques la nuit toute de noir vêtue et je n'ai jamais vraiment porté de jupe. Un jour j'ai effleuré du doigt la très hypothétique perspective de m'installer avec quelqu'un. Pour dire la vérité, j'ai seulement passé 48h sous le toit de la maison de ses parents (sans ses parents bien sûr !) avec plein de gens qui squattaient là aussi (de vieux amis et des gens rencontrés la veille au soir). On me prenait pour la "maîtresse de maison" et j'adorais ça. C'est à peine si j'avais entrepris d'arroser les plantes... Mais au final je l'ai imaginé lui, complètement défoncé un matin et devant, encore tout tremblotant et le ventre vide depuis 24h, amener les gosses à l'école, et là j'ai eu comme un doute alors j'ai fini par me barrer.Seule et sans gosses.
Et depuis j'attends. Alors parfois je me trimballe avec un anneau en fer au doigt, ça me fait une compagnie rassurante.

Et NON je n'ai pas l'intention de demander à mes amis de trouver une maison à ce putain de pingouin solitaire qui a pointé son cul dans ma ferme virtuelle ! (cf notes précédentes)