Pour le déménagement, j'ai acheté des cartons. Dépliés dans ma chambre, les cartons sentent le vomi. Pour couvrir cette désagréable odeur, j'exhume un bâton d'encens du tiroir de ma table de nuit pour le bruler. Règne maintenant, en plus du vomi, une puissante odeur de cramé. Les yeux irrités par la fumée du bâton que je ne tarde pas à écraser dans un reste de bougie, j'évalue la quantité de bordel qui s'est accumulé depuis des années rien que dans ma table de nuit. Décidée, j'ouvre le tiroir et commence à trier : une paire de chaussettes rayées, un livre, une bougie encore neuve, des cahiers dans lesquels figurent dessins, croquis, barbouillages, et des mots que je n'ai plus le courage de relire, en partie par honte mais aussi parce qu'à l'époque ma vie était plus mouvementée et que justement tout cela me manque.
Je continue à gratter, mettant à nu les différentes strates, différentes périodes de ma vie, éparpillant mon intimité dans toute la pièce afin d'y mettre un peu d'ordre. Un reste de tabac à rouler, du papier à cigarettes, et bien planqué au fond d'un minuscule sachet en plastique, quelques feuilles d'herbe. Et des médicaments périmés (?) de toutes sortes. Poubelle. Mon agenda quand j'étais en terminale. Je l'ouvre, le parcours, tous les contrôles sont signalés par des têtes de mort, des photos de mes héros de l'époque sont collées sur les jours fériés. Garder ou jeter ? Allez, c'est pas si terrible que ça, je décide de faire ma star, et visant la corbeille, balance d'un geste théâtral l'agenda qui s'écrase à côté. Je soupire.
De toute façon le lycée c'est loin, comme ces gens que j'y ai croisés, oubliés, puis brièvement revus figés dans une pose sur facebook. C'est con mais à l'époque pour avoir des nouvelles des gens il fallait leur parler, maintenant il suffit de jeter un œil sur leur putain de "mur".
Les cartons sentent toujours le vomi et mon chantier n'avance guère. J'ouvre la fenêtre et éparpille encore plus mon bordel : j'ai besoin d'aérer pour y voir plus clair. J'ai l'impression d'étouffer, j'ai envie d'être enfin chez Moi. Garder des souvenirs dans ma chambre ou vider les lieux ? Je n'ai pas la prétention de transformer la maison de mes parents en musée, mais je me vois mal emporter mes vieux dessins, témoins de rares impulsions créatives. Je les range donc dans un tiroir, préférant laisser tout ça en suspens. Arrêt sur image.
Par correction, j'efface tout de même mes traces, mes tags à la craie ou à la peinture sur les poutres apparentes de la chambre, commence par le "I've lost control again" qui trône au-dessus de mon lit. Celui-ci s'efface aisément, mais l'empreinte de ma main à la peinture noire part plus difficilement. Adolescente égoïste que j'étais, il ne m'est pas venu à l'esprit qu'un jour cette chambre ne serait plus la mienne et qu'en plus le bois est un matériau fragile qui absorbe tout et ne supporte pas l'eau, ce qui rend son entretien difficile...
La nuit tombe tandis que je me bats avec le scotch qui colle que dalle, fermant des cartons dans lesquels je n'ai mis que des affaires neutres, de celles qui ne représentent rien sentimentalement parlant, préférant finalement laisser les souvenirs sur place. Ils seront mieux gardés ainsi. Dans la rue des gens défilent avec des torches. Quelle sorcière va-t-on brûler ce soir ?
C'est le 13 juillet et tandis qu'avec des miettes de tabac à rouler je fume une cigarette accoudée au rebord de ma fenêtre comme je l'ai souvent fait en cachette, apparaissent dans le ciel des étincelles, des lumières de toutes les couleurs. Songeuse, je me rappelle tous les moments que j'ai passés ici : des crises de nerfs, des siestes, des pleurs, des séances désespérées d'abdos, des heures de travail, d'autres à écouter des la musique, beaucoup d'ennui mais surtout des heures à rêvasser et à élaborer des histoires afin de rendre ma vie moins minable.
Arrive le final, des gens applaudissent, je fais une révérence et rejoins mon lit. Rideau.
Je continue à gratter, mettant à nu les différentes strates, différentes périodes de ma vie, éparpillant mon intimité dans toute la pièce afin d'y mettre un peu d'ordre. Un reste de tabac à rouler, du papier à cigarettes, et bien planqué au fond d'un minuscule sachet en plastique, quelques feuilles d'herbe. Et des médicaments périmés (?) de toutes sortes. Poubelle. Mon agenda quand j'étais en terminale. Je l'ouvre, le parcours, tous les contrôles sont signalés par des têtes de mort, des photos de mes héros de l'époque sont collées sur les jours fériés. Garder ou jeter ? Allez, c'est pas si terrible que ça, je décide de faire ma star, et visant la corbeille, balance d'un geste théâtral l'agenda qui s'écrase à côté. Je soupire.
De toute façon le lycée c'est loin, comme ces gens que j'y ai croisés, oubliés, puis brièvement revus figés dans une pose sur facebook. C'est con mais à l'époque pour avoir des nouvelles des gens il fallait leur parler, maintenant il suffit de jeter un œil sur leur putain de "mur".
Les cartons sentent toujours le vomi et mon chantier n'avance guère. J'ouvre la fenêtre et éparpille encore plus mon bordel : j'ai besoin d'aérer pour y voir plus clair. J'ai l'impression d'étouffer, j'ai envie d'être enfin chez Moi. Garder des souvenirs dans ma chambre ou vider les lieux ? Je n'ai pas la prétention de transformer la maison de mes parents en musée, mais je me vois mal emporter mes vieux dessins, témoins de rares impulsions créatives. Je les range donc dans un tiroir, préférant laisser tout ça en suspens. Arrêt sur image.
Par correction, j'efface tout de même mes traces, mes tags à la craie ou à la peinture sur les poutres apparentes de la chambre, commence par le "I've lost control again" qui trône au-dessus de mon lit. Celui-ci s'efface aisément, mais l'empreinte de ma main à la peinture noire part plus difficilement. Adolescente égoïste que j'étais, il ne m'est pas venu à l'esprit qu'un jour cette chambre ne serait plus la mienne et qu'en plus le bois est un matériau fragile qui absorbe tout et ne supporte pas l'eau, ce qui rend son entretien difficile...
La nuit tombe tandis que je me bats avec le scotch qui colle que dalle, fermant des cartons dans lesquels je n'ai mis que des affaires neutres, de celles qui ne représentent rien sentimentalement parlant, préférant finalement laisser les souvenirs sur place. Ils seront mieux gardés ainsi. Dans la rue des gens défilent avec des torches. Quelle sorcière va-t-on brûler ce soir ?
C'est le 13 juillet et tandis qu'avec des miettes de tabac à rouler je fume une cigarette accoudée au rebord de ma fenêtre comme je l'ai souvent fait en cachette, apparaissent dans le ciel des étincelles, des lumières de toutes les couleurs. Songeuse, je me rappelle tous les moments que j'ai passés ici : des crises de nerfs, des siestes, des pleurs, des séances désespérées d'abdos, des heures de travail, d'autres à écouter des la musique, beaucoup d'ennui mais surtout des heures à rêvasser et à élaborer des histoires afin de rendre ma vie moins minable.
Arrive le final, des gens applaudissent, je fais une révérence et rejoins mon lit. Rideau.
1 commentaire:
Fort beau texte. Moment émouvant.
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