dimanche 22 juin 2008

finalement

Encore des SMS qui commencent par "Finalement".
J'ai horreur de ça, surtout quand je viens à peine de grimper dans la voiture après avoir changé de tenue cinq fois, essayé trois débardeur, deux chemisiers, pour finalement me décider pour mon vieux T-shirt. Une valeur sûre.
J'ai juste passé 30mn à mettre de la crème sur mon visage, me maquiller, enlever la crème parce qu'avec la ch
aleur c'était teint luisant assuré, mettre du gel puis rincé les cheveux parce qu'il colle trop, puis remettre de la laque.
Je venais de glisser un CD joyeux dans
le lecteur, j'étais en train de chantonner gaiment, le coude dépassant de la fenêtre, lorsque je sens quelque chose vibrer dans ma poche droite. Sous le coup de la surprise et du stress je suis un peu montée sur le rond-point dans le virage.
Une fois sur l'autoroute je lis le message.
Comment ça "Finalement je vais à ... " ? C'est où ça ?
Je soupire.
Finalement... ce mec me ressemble, capable de tout lâcher à la dernière minute pour enfourcher son vélo et faire un tour juste parce q
u'il fait bon dehors. Un putain d'oiseau libre. Qu'est-ce que je peux y faire ? C'est ça, enfuis-toi va. Envole-toi mais arrête avec les promesses. Des paroles en l'air, des plans évasifs, des "si" des "quand", du futur à toutes les sauces, me font me sentir tellement légère, puis tu conclues lamentablement par un sale "finalement" et j'atterris.
Je change de CD.


Les rues sont bondées, il fait une chaleur éto
uffante. Des grappes de flics, des camions de pompiers, de la Croix Rouge. Des lumières rouges, bleues, des tas de gens, des litres de Meteor, des centaines de papiers par terre, on sentirait presque les vapeurs d'alcool émaner du sol.
Finalement je rejoins L. sur les quais.
Toujours le même bateau. Accoudée à la rambarde extérieure à défaut d'être accoudée au comptoir, je regarde les mecs fair
e leur show.
Toujours le même principe. Des garçons tout de noir vêtus, jean râpé juste ce qu'il faut, barbe de trois jours et mèche noire, san
s oublier la fameuse étoile sur les godasses aux bouts blancs. Je ne me suis pas encore lassée du tableau. Il y en aura toujours un qui me fascinera dans le lot, avec son look de jeune rebelle.
Et me voilà une bouteille à la main, sirotant de la bière tiède. Le chanteur est la réincarnation de Ian Curtis qui chanterait comme Pauls Banks.
Finalement L. achète leur album, moi n
on : j'ai déjà tous les albums d'Interpol, merci... Il fait presque nuit maintenant, et un homme vient de sauter dans le canal. Un bateau mouche rempli de touristes passe. Je pense à Jeff Buckley et à cette chanson. Cette chanson que j'étais la seule à connaître il y a cinq ans et qui passe actuellement sur toutes les radios. Le monde se réveille et redécouvre Jeff Buckley treize ans trop tard. Amen.
J'aperçois Th. en bas, mais cette fois je ne cherche plus son regard. Je fais très bien semblant de ne pas voir les gens. Tellement bien, que comme ce n'est absolument pas crédible, voire d'un ridicule pathétique, je finis par inspirer le mépris de la personne à éviter face à mon comportement hautem
ent puéril. Il ne fait donc pas non plus d'effort pour me parler, ce qui m'arrange bien étant donné que la dernière fois que je l'avais croisé, il m'avait serrée avec autorité dans ses maigres bras de géant, m'obligeant presque à me débattre pour lui échapper. C'était la première fois que j'avais vraiment peur d'être dans les bras de quelqu'un, des bras dont je ne voulais pas et qui pourtant s'imposaient, profitant de leur force et de la situation.

Tiens, je vibre, finalement un nouveau SMS est arrivé.
Finalement l'oiseau rentre dans sa cage, p
as si libre que ça... J'insiste pour qu'il vienne au moins me dire bonsoir. Vingt minutes plus tard il me trouve, je planque ma bouteille de 75 cl où clapote un petit fond, je vais essayer de passer pour une gentille fille cette fois.
Comme souvent, on marche un peu à travers la ville, parmi la foule qui gronde. Ouvrant le chemin, il tend la main derrière lui en protecteur pour ne pas me perdre en cas de bousculades. Deux ou trois fois il me prendra le bras afin de m'éviter un désagrément quelconque. On parle mais je lui coupe souvent la parole, l'alcool ayant quelque peu occulté mon sens de la polites
se et décuplé mon enthousiasme. J'aurais tellement aimé qu'il se confie à moi, mais je suis bien trop bavarde et grisée par l'ambiance pour pouvoir l'écouter. Je me rendrai compte seulement le lendemain que je devais être insupportable, ramenant tout à moi moi moi. Et moi c'est pareil, et moi un jour, et une fois moi j'ai fait, moi je...je moi.
L'heure avançant, de plus en plus de jeunes gens titubent dans les rues une bouteille à la main, ou s'affalent sur les trottoirs pourtant déjà jonchés de détritus.
Il m'accompagne finalement jusqu'à ma voiture, puis tels des gamins qui se raccompagnent à n'en plus finir oscillant entre
deux foyers jusqu'à ce qu'une de leur mère exaspérée les appelle, je l'ai à mon tour reconduit chez lui. Une dizaine de minutes plus tard, ma poche droite vibre à nouveau, me faisant presque caler au feu rouge. C'était pour me souhaiter une agréable nuit.

Finalement, c'était une bonne soirée.




2 commentaires:

ultimate a dit…

nom de zeus, paul banks. je lui ai parlé un jour, bon pas grand chose, mais quand même, je m'en suis jamais remise.

Monday Morning a dit…

Classe ! C'était aux Eurockéennes ? Moi je ne les ai vus que là-bas en tout cas...