dimanche 28 septembre 2008

Apprendre à se connaître

Il m'a fallu pénétrer dans sa chambre, que dis-je, son lieu de culte dédié à sa copine pour enfin comprendre.
Partout des photos, des cartes postales pleines de cœurs, des cadres entourés de cœurs, d'autres carrément en forme de cœurs, des photos d'eux à la plage...

Depuis qu'il est persuadé que je suis (aussi) attirée par les filles, il ne me laisse plus tranquille. Il me bombarde d'allusions, auxquelles je ne réponds pas, il m'assomme de sous-entendus.

Son obsession à essayer de me caser avec n'importe qui (si possible de déjà pris) a laissé place à son obsession à en découvrir plus sur ma sexualité.
Comme il m'a abandonnée dans sa chambre-sanctuaire, je quitte son appartement que je ne reverrai certainement pas avant un très long moment. Il y a quelques minutes, il faisait semblant de vouloir me mettre dehors. Par jeu, on a simulé une conversation proche d'une rupture qui m'a rappelé de mauvais souvenirs.

Mon cœur se serre lorsque je me souviens de l'autre appartement qui ressemblait fort à un squat et où je passais mes week-ends entre les bouteilles de vin, les cafards et les cendriers. Lorsque je l'avais quitté celui-là, j'avais essayé d'enregistrer le plus de détails possibles : la place de tel poster, le commencement de cette fameuse lézarde au plafond que j'étais condamnée à fixer pendant des heures le temps qu'il daigne se réveiller.
Et ce fameux jour où une fois de plus je l'attendais depuis 15mn dans le bar, assise à la table face à la porte. Ce jour où je n'ai rien ressenti lorsque celle-ci s'est enfin ouverte, laissant apparaître sa petite personne. Ce jour là, j'ai su que c'était fini, même si, pour citer Morrissey, ça n'avait jamais vraiment commencé.

A la crémaillère, on fait une contre-soirée dans le couloir de l'appartement, comme il se doit. Les couloirs sombres et étroits sont bizarrement les meilleurs endroits pour avoir une conversation "intime" et bien souvent les vérités les plus embarrassantes s'y dévoilent naturellement, entre la cuisine et la salle de bains. Adossés à la cloison, un verre qu'on vient de nous tendre à la main, on discute.

J'apprends ainsi que je "manque de tact". Cruelle nouvelle, même si malheureusement pour mes congénères, je l'ai parfois déjà remarqué. Je demande néanmoins des précisions. On me rappelle la soirée juste après les résultats du Capes, soirée au cours de laquelle je me suis "plainte" d'être dernière du classement, de n'avoir aucun points, et d'avoir une chance certaine de me retrouver loin de la maison. Le problème c'est que je m'en suis "plainte" à mes camarades qui avaient échoué.
La honte m'envahit. Je m'en souviens. J'ai de la peine car je me souviens très bien de la rue dans laquelle je leur ai infligé ça, entre le bar et le cinéma, mais que je ne me souviens absolument pas du visage de mes camarades.

Égocentrique que je suis, je ne me suis même pas rendue compte que c'était terriblement cruel. On me dit qu'on avait envie de me dire "ta gueule". Je réponds qu'il fallait me le dire, mais évidemment c'est maintenant trop tard.

Ce soir, j'ai décidé de décrocher. Fini le personnage de la prof qui donne des ordres toute la journée et qui utilise presque uniquement le mode impératif. "Notez, écrivez, écoutez, taisez-vous, sors tes affaire, donne-moi ça, regarde par ici, dépêche-toi un peu, ne me réponds pas, rends-toi utile, distribue-moi ça, obéis maintenant, retourne-toi, calme-toi, viens au tableau, arrête de jouer, posez vos stylo, prenez votre stylo rouge, copiez, ramassez ça, lève-toi, asseyez-vous, apporte-moi ton carnet de correspondance, prenez votre classeur, soulignez, encadrez, sautez une ligne....."
J'ai terriblement besoin de sortir de la peau de cette personne que je n'apprécie guère qui est apparue début septembre et qui est en train de prendre le dessus sur moi. Difficile d'être agréable avec son entourage lorsqu'on commande toute la journée.


Ce soir j'enfile mon "jean festival" qui n'est qu'un vieux jean moulant comme on en faisait à l'époque, plus vraiment noir et déchiré consciencieusement sur le genou et sous la fesse gauche, ainsi que sur le côté droit, le tout tenu par quelques épingles à nourrice juste pour le principe.
Je me souviens quand j'étais bien plus jeune, et qu'avant de sortir, j'avais droit à l'inspection de ma mère qui contrôlait ma tenue et mon apparence. J'enfilais alors un deuxième pantalon par-dessus mon "jean festival" que j'ôtais une fois dans la voiture.


Ce soir, une nana déjà bien défoncée à 22h30 me caresse le dos et je m'accroche à la barrière pour empêcher mon estomac d'éclater sous la pression du public qui pousse au rythme de la musique.

C'est aussi à cette occasion que j'ai pris ma première claque dans la gueule, mon premier "coup de vieux". Je sais que ça va en énerver certains que je prétende avoir un "coup de vieux" étant donné mon très jeune âge, mais c'est pourtant ce que j'ai ressenti en voyant toutes ces minettes à frange et blouson simili s'extasier devant un concert que je qualifierais de nul à chier et sans aucun intérêt. La foule se met en branle tandis que je reste impassible, limite consternée.

Je quitte les lieux bien vite, sauvée par L. qui va à ma rencontre et m'offre une part de cake gras et sucré, garni de graines de quinoa pour la santé et de Nutella pour le goût, tandis que des mecs beuglent et titubent autour de nous. Lui il s'en fout si je n'ai pas de cœur, si je suis sans tact, si je suis autoritaire, si je suis élitiste.
Ou alors il ne me connaît pas encore assez.


2 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est pas un peu cul-cul, tout de même, ces photos de lui et sa copine et ces cartes postales en forme de coeur ?

Monday Morning a dit…

Si, terriblement.
Mais venant d'un mec, ça m'amuse plutôt, même si sur le coup ça ne m'a inspiré que de la pitié...