lundi 25 février 2008

La mémoire neuve

Au début, quand il me racontait des choses qu'il m'avait déjà dites une ou deux fois, sans se rendre compte qu'il radotait, et avec les mêmes mots, les mêmes effets de style, ça m'étonnait et m'inquiétait un peu. Par la suite mon inquiétude s'est transformée en lassitude et irritation ; les premières fois je n'osais rien dire, et ponctuais ses phrases par des "nooon ?!" "ah oui ?!" qui sonnaient vrai parce que je suis plutôt bonne actrice. Par la suite, je le coupais dès le début, "ouiii c'est vrai, tu me l'as déjà raconté". Néanmoins, au fond de moi, j'avais peur pour sa mémoire. Je mettais ces failles sur le compte des excès. Je veux bien qu'il parle de certaines choses à ses nombreux potes, et qu'à la fin il ne sache plus exactement à qui il l'a dit, dans quelle soirée, dans quel bar et qui était autour de la table à ce moment... Mais à moi, quand même ! Mon côté jeune fille pure trouvait tout cela absolument déplorable. Et puis j'ai commencé à m'apercevoir que ma propre mémoire me jouait parfois des tours. Certains moments, un prénom me dit vaguement quelque chose, j'ai l'impression que j'ai rencontré la personne à une soirée, mais je suis incapable de dire où exactement. Je confonds régulièrement les prénoms. Julien s'appelle en fait Jérôme, Paul est en fait Marc. L'autre soir, en conduisant je suis partie dans mon délire récurent : j'ai raconté à F. que mes parents ne me laissaient décidément pas vivre ma vie. Il m'écoutait patiemment, quand tout à coup je me suis aperçue que je lui avais déjà tout dit sur MSN la veille. Distraite je l'ai toujours été. Ne plus savoir où j'ai bien pu garer ma voiture est un désagréable sentiment bien familier. Mais radoter, ça m'énerve profondément. J'ai l'impression de reproduire les manies de mes parents qui m'ont toujours agacées. Et finalement, en regardant autour de moi, je me suis rendue compte que je n'étais pas la seule. F. ne se souvenait même pas quels boulot font mes soeurs, il confond les lieux et heures de rendez-vous, et il m'accuse ensuite de faire n'importe quoi alors qu'on s'était mis d'accord la veille au téléphone. Il faut croire qu'avec le temps, les neurones se dégradent et que c'est un processus naturel. Notre cerveau devait être au mieux de sa forme quand on avait 16 ans...


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